Nom : Céline Bonnaire
Coalition d'action : La violence fondée sur le genre
Rôle et organisation : Déléguée générale de la Fondation Kering
Pourquoi votre organisation s'est-elle engagée à jouer un rôle moteur dans la coalition d'action sur la violence sexiste ?
En 2008, François-Henri Pinault, le président de Kering, a créé la Fondation Kering pour mettre fin à la violence contre les femmes. Il souhaitait que le groupe se concentre sur une cause pour laquelle il pourrait réellement faire changer les choses ; nous nous en occupons maintenant depuis 13 ans, au moyen d'une stratégie centrée sur des partenariats féministes majeurs.
Notre ambition est de diffuser notre expérience, partager notre réseau, étendre notre action et mobiliser un groupe plus large d'entreprises dans notre combat contre la violence sexiste. Nous croyons profondément que chacun a un rôle à jouer dans l'élimination de la violence contre les femmes ; c'est pourquoi l'un de nos grands axes de travail, à la Fondation Kering, consiste à obtenir le concours d'autres acteurs pour entreprendre une action collective. Le réseau OneInThreeWomen, que nous avons cofondé en 2018 avec la Fondation Face, en est un exemple important : premier réseau européen d'entreprises engagées contre la violence sexiste, il diffuse de bonnes pratiques et élabore des outils en commun. Il repose sur la même approche de coopération avec de multiples acteurs que les coalitions d'action, par conséquent devenir l'un des champions de coalition était une étape naturelle.
Les conversations régulières et inclusives que nous avons avec les champions de notre coalition d'action portent sur les moyens de mettre fin au cloisonnement, l'écoute réciproque des points de vue et l'adoption d'une perspective à long terme. Ces discussions ont montré clairement que les organisations combat contre la violence sexiste rencontrons tous les mêmes difficultés, notamment les réactions de rejet et un manque de financement et de capacités. Ce constat nous a mené à quelques ambitions très concrètes. Nous avons élaboré des objectifs, des cibles et des indicateurs clairs, et nous allons définir des engagements à surmonter les barrières. J'ai bon espoir que nous réalisions des changements réels, transformateurs et intersectionnel pour les femmes et les filles dans toute leur diversité.
Quel serait pour vous le résultat idéal du Forum Génération Égalité ?
Réussir à obtenir un ensemble d'engagements concrets de divers participants en faveur de l'égalité hommes-femmes serait un résultat important. Nous avons un formidable groupe moteur pour chaque coalition d'action, mais il est temps à présent que de nouvelles personnes prêtes à s'engager rejoignent l'initiative et nous aident à concrétiser le changement. Il est vital, en particulier, que nous parvenions à impliquer davantage d'entreprises s'engageant à prendre des mesures pour mettre fin à la violence sexiste. Après ce Forum, chacun devrait comprendre comment il(elle) peut devenir un agent du changement et promouvoir l'égalité hommes-femmes aussi bien que l'élimination de la violence sexiste à tous les niveaux, depuis le niveau personnel et familial jusqu'au niveau sociétal et institutionnel. J'espère que chaque participant(e) quittera le Forum en sachant quel changement il(elle) doit mettre en œuvre le lendemain pour aider à réaliser l'égalité entre les hommes et les femmes.
Quel est le changement le plus urgent à réaliser dans le domaine de la violence sexiste et quelle action stimulerait le mieux ce changement ?
Je pense que les changements les plus urgents sont ceux que nous avons soulignés dans les quatre actions principales élaborées ensemble au sein de la coalition d'action. Ces actions tiennent compte de la nécessité d'avoir davantage d'États ratifiant les conventions internationales et régionales, et davantage d'acteurs des secteurs public et privé adoptant des plans d'action pour mettre fin à la violence sexiste. Nous donnons également la priorité à la mise en œuvre et au financement de stratégies de prévention s'appuyant sur des éléments probants, en particulier celles qui incluent la jeune génération, pour mettre fin aux cycles intergénérationnels de violence et engager les hommes et les garçons dans la conversation.
La transformation du financement est un autre besoin urgent que nous soulignons. Bien que tout le monde soit d'accord pour dire que les organisations pour les droits des femmes doivent recevoir de meilleurs financements, si vous regardez où va l'argent, vous verrez que les organisations dirigées par des femmes et des filles ne reçoivent que 7 % du financement caritatif mondial. C'est pourquoi nous nous concentrons d'une part sur l'augmentation d'un financement flexible et de qualité de la part des États, du secteur privé et d'autres donateurs, à des organisations dirigées par des femmes et des filles, et d'autre part sur la nécessité, plus largement, d'étendre et d'améliorer le financement des services coordonnés axés sur les victimes.
Qu'est-ce qui vous motive personnellement à poursuivre votre action en faveur du changement ?
J'ai deux réponses, dont la première est d'ordre professionnel. Depuis le premier jour, je suis constamment stupéfaite par la résilience et la force des survivantes. Je poursuis ce travail parce que je pense qu'en soutenant ces femmes, nous allons dans la bonne direction, et parce que je veux un futur dans lequel aucune femme ne devra avoir survécu à la violence. La deuxième réponse est que dans ma vie personnelle, j'ai deux enfants : un garçon et une fille. Je les élève comme des féministes mais je vois clairement à quel point les stéréotypes nocifs commencent tôt et la difficulté que représente le fait de voir les messages reçus à la maison en faveur de l'égalité hommes-femmes être contrecarrés par les messages reçus à l'école, dans les programmes télévisés, les jeux vidéo, etc. Conserver un équilibre est très difficile, et je veux voir ces normes sexuelles évoluer.
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